PIQUESSARY
Piquessary ! Ce nom évoque pour bien des boucalais, les combats acharnés de l’équipe de rugby fanion, pour préserver l’invincibilité des « noirs forgerons », à la maison. Le match le plus glorieux sera sans nul doute le match nul concédé le 11 mars 1923 par le champion en titre, le Stade Toulousain. Voici d’ailleurs un extrait d’un article paru dans le « Courrier de Bayonne » de l’époque : «… La date du 11 mars 1923 sera sans conteste la plus glorieuse de l’histoire du Boucau-Stade. Elle rappellera qu’un jour le vaillant et modeste club de travailleurs, qui porte le maillot noir, a tenu en échec d’un bout à l’autre d’une partie officielle le champion de France au renom fameux, la pléiade d’internationaux et de sélectionnés groupés sous l’étendard rouge et noir du Stade Toulousain … »
L’auto le journal de référence du sport dans les années 1920 titre le lundi 12 mars 1923 : « Les champions de France tenus en échec ».Mais quelle est l’origine de « Piquessary »,
tout le monde a donné sa version, jusqu’à penser qu’un pirate, le fameux
Piquessary, en était propriétaire, et qu’il allumait des feux pour attirer les
navires sur la côte et ainsi mieux les piller.
On va le voir la réalité est toute autre.
Avant la « Révolution » (1789)
la propriété s’appelait Péclère, et les vieux boucalais se rappellent que la
rue du 19 mars 1962, s’appelait autrefois le chemin de Péclère.
Le premier propriétaire dont j’ai trouvé
la trace s’appelle Saubat Detcheverry de Saint Forcet, avocat au parlement, il
habite Bayonne en 1676. Son fils Charles Detcheverry de Saint Forcet, avocat, a
une fille unique, Marie Detcheverry, qui épouse Jean Louis de la Framboisière,
écuyer de la reine douairière d’Espagne, Marie Anne de Neubourg[2]. Le contrat de mariage est
retenu par Pierre Lesseps[3], notaire à Bayonne, le 17
novembre 1721. Marie était la fille unique et héritière de Charles Detcheverry.
La famille de La Framboisière, devient ainsi propriétaire de Péclère.
On remarque la signature de Marie Anne de Neubourg "Yo la Reyna" Moi la Reine |
« …
propriété de Péclère située en la paroisse de Tarnos, quartier du Boucau …. Consistant
en maison de maitre, sans qu’il y ait aucun meuble et effets mobiliers, logement de métayer, reste d’un vieux
pressoir et quelque petit bâtiment délabré, jardin parti en friche, vigne
peuplée de petits vergers de pommes, deux arpents de terre sable labourable, un
vieux bosquet dégarni d’environ ¾ d’arpents … »
En voici les confrontations
« …
Du levant à l’héritage de Lartigue appartenant aux héritiers de Gontaire
(Honteyres actuellement) ; du midi vers la rivière à lande commune, chemin
entre deux, du couchant du Pey appartenant à Laboulite et Jeannoulet, du nord
au Petit Lartigue et à des arbres en commun… ». La vente est
faite moyennant 3500 livres.
Bernard Piquessary, notaire à Bayonne a
trois frères : Jean né en 1704, prêtre ; Bernard François Léon et
Bertrand capitaines de navires.
C’est Bernard François Léon Piquessary qui
est le corsaire de la famille. La guerre de course, car il s’agit de cela, est
très réglementé. La France étant en guerre contre l’Angleterre au milieu du 18ème
siècle, les armateurs pouvaient armer des navires pour aller capturer des
navires ennemis. Bernard Piquessary capturera de nombreux navires avec le Lion :
5 en 1747. Avec le Machault en 1758 il n’y eu qu’une prise, mais de taille car
elle rapporta 20 000 livres au capitaine.
« Je
n’ai de successeur qu’en ligne collatérale, usant du bénéfice que la loi m’accorde
en ce cas, je donne et lègue au sieur Jacob Baïs mon mari, tous les meubles, effets
mobiliers, linge, argenterie, argent monnayé, sans aucune exception …. Et quant
au bien de Péclère, je le donne et lègue à Rachel Emilie Dovalle ma nièce,
demeurant à Bordeaux que j’institue pour ma légataire particulière dans l’objet
de le recueilli après le décès de Jacob Baïs mon mari a qui j’en lègue la
jouissance sa vie durant …. »
Après le décès de Rachel Dovalle, le 23/4/1891 au Boucau, ses héritiers mettent la propriété en vente aux enchères publiques. Pierre Louis Gonzague Lobit, achète la propriété de Péclère, que l’on appelle aussi Piquessary, à la chaleur des enchères[4] le 17/11/1892. Le nouvel acquéreur est capitaine d’infanterie 49ème RI à Bayonne. Le capitaine Lobit est décédé au Boucau le 4/5/1919 ses héritiers vont alors mettre en vente le bien. Le Boucau-Stade devient propriétaire du terrain le 25/11/1921, il l’agrandira avec un autre acte du 3/11/1927.
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Le stade de Piquessary dans les années 1930-1940 |
[1] Fondé en
1907 le Boucau-Stade change de nom le 25/3/1988 pour s’appeler
Boucau-Tarnos-Stade
[2] Marie
Anne de Neubourg (1667-1740) fut reine d’Espagne par son mariage avec Charles
II, le couple n’eut pas d’enfants. Le roi meurt le 1/12/1700 et avec ce décès s’ouvre
la guerre de succession d’Espagne. Elle est exilée en France, à Bayonne, en
1708, par Louis XIV qui avait placé sur le trône d’Espagne son petit-fils le
futur Philippe V. A Bayonne elle a vécu rue Montaut. Son exil prit fin en
septembre 1738. Elle est décédée à Guadalajara le 16/7/1740.
[3] Ancêtre de Ferdinand de Lesseps le constructeur
du canal de Suez
[4] A chaque enchère une bougie est allumée. Si
elle s’éteint sans nouvelle enchère, une seconde bougie est allumée, puis une
troisième. A son extinction le dernier enchérisseur emporte l’objet. (Les
bougies durent 30 secondes environ)
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