mercredi 18 novembre 2020

PIQUESSARY

 PIQUESSARY

Piquessary ! Ce nom évoque pour bien des boucalais, les combats acharnés de l’équipe de rugby fanion, pour préserver l’invincibilité des « noirs forgerons », à la maison. Le match le plus glorieux sera sans nul doute le match nul concédé le 11 mars 1923 par le champion en titre, le Stade Toulousain. Voici d’ailleurs un extrait d’un article paru dans le « Courrier de Bayonne » de l’époque : «… La date du 11 mars 1923 sera sans conteste la plus glorieuse de l’histoire du Boucau-Stade. Elle rappellera qu’un jour le vaillant et modeste club de travailleurs, qui porte le maillot noir, a tenu en échec d’un bout à l’autre d’une partie officielle le champion de France au renom fameux, la pléiade d’internationaux et de sélectionnés groupés sous l’étendard rouge et noir du Stade Toulousain … »

L’auto le journal de référence du sport dans les années 1920 titre le lundi 12 mars 1923 : « Les champions de France tenus en échec ».



Pourtant le Boucau-Stade[1]revenait de loin, quelques années auparavant le terrain qu’il utilisait depuis quelque temps était en vente, il devenait vital pour l’Amicale Boucalaise de l’acheter. Les 30 000 francs furent trouvés et le terrain de Piquessary devint la propriété du Boucau-Stade le 25/11/1920.

Mais quelle est l’origine de « Piquessary », tout le monde a donné sa version, jusqu’à penser qu’un pirate, le fameux Piquessary, en était propriétaire, et qu’il allumait des feux pour attirer les navires sur la côte et ainsi mieux les piller.

On va le voir la réalité est toute autre.

Avant la « Révolution » (1789) la propriété s’appelait Péclère, et les vieux boucalais se rappellent que la rue du 19 mars 1962, s’appelait autrefois le chemin de Péclère.

Le premier propriétaire dont j’ai trouvé la trace s’appelle Saubat Detcheverry de Saint Forcet, avocat au parlement, il habite Bayonne en 1676. Son fils Charles Detcheverry de Saint Forcet, avocat, a une fille unique, Marie Detcheverry, qui épouse Jean Louis de la Framboisière, écuyer de la reine douairière d’Espagne, Marie Anne de Neubourg[2]. Le contrat de mariage est retenu par Pierre Lesseps[3], notaire à Bayonne, le 17 novembre 1721. Marie était la fille unique et héritière de Charles Detcheverry. La famille de La Framboisière, devient ainsi propriétaire de Péclère.

On remarque la signature de Marie Anne de Neubourg "Yo la Reyna" Moi la Reine

Le fils du couple, Louis de La Framboisière vend la propriété de Péclère, le 10 mai 1758 en faveur de Bernard Piquessary, notaire Bayonnais

« … propriété de Péclère située en la paroisse de Tarnos, quartier du Boucau …. Consistant en maison de maitre, sans qu’il y ait aucun meuble et effets mobiliers, logement de métayer, reste d’un vieux pressoir et quelque petit bâtiment délabré, jardin parti en friche, vigne peuplée de petits vergers de pommes, deux arpents de terre sable labourable, un vieux bosquet dégarni d’environ ¾ d’arpents … »

En voici les confrontations

« … Du levant à l’héritage de Lartigue appartenant aux héritiers de Gontaire (Honteyres actuellement) ; du midi vers la rivière à lande commune, chemin entre deux, du couchant du Pey appartenant à Laboulite et Jeannoulet, du nord au Petit Lartigue et à des arbres en commun… ». La vente est faite moyennant 3500 livres.

Bernard Piquessary, notaire à Bayonne a trois frères : Jean né en 1704, prêtre ; Bernard François Léon et Bertrand capitaines de navires.

C’est Bernard François Léon Piquessary qui est le corsaire de la famille. La guerre de course, car il s’agit de cela, est très réglementé. La France étant en guerre contre l’Angleterre au milieu du 18ème siècle, les armateurs pouvaient armer des navires pour aller capturer des navires ennemis. Bernard Piquessary capturera de nombreux navires avec le Lion : 5 en 1747. Avec le Machault en 1758 il n’y eu qu’une prise, mais de taille car elle rapporta 20 000 livres au capitaine.


Le 3 janvier 1787, Jeanne Marie Cailleau, veuve de Bernard Piquessary, vend la propriété de Péclère en faveur de Daniel et Richard Dovalle conjoints moyennant 6000 livres. Daniel Dovalle est décédé à Tarnos le 24/9/1805, ses enfants Dina et Daniel héritent de la propriété. Dina Dovalle est décédée à Tarnos le 8/2/1837, elle avait épousé à Tarnos le 24/1/1835 Jacob Julien Baïs natif de Peyrehorade. Le 19/10/1836 elle rédige devant Doussy, notaire à Saint Esprit, son testament

« Je n’ai de successeur qu’en ligne collatérale, usant du bénéfice que la loi m’accorde en ce cas, je donne et lègue au sieur Jacob Baïs mon mari, tous les meubles, effets mobiliers, linge, argenterie, argent monnayé, sans aucune exception …. Et quant au bien de Péclère, je le donne et lègue à Rachel Emilie Dovalle ma nièce, demeurant à Bordeaux que j’institue pour ma légataire particulière dans l’objet de le recueilli après le décès de Jacob Baïs mon mari a qui j’en lègue la jouissance sa vie durant …. »


Rachel Dovalle rentrera en possession du bien de Péclère, après le décès de Jacob Julien Baïs survenu à Peyrehorade le 23/4/1863.

Après le décès de Rachel Dovalle, le 23/4/1891 au Boucau, ses héritiers mettent la propriété en vente aux enchères publiques. Pierre Louis Gonzague Lobit, achète la propriété de Péclère, que l’on appelle aussi Piquessary, à la chaleur des enchères[4] le 17/11/1892. Le nouvel acquéreur est capitaine d’infanterie 49ème RI à Bayonne. Le capitaine Lobit est décédé au Boucau le 4/5/1919 ses héritiers vont alors mettre en vente le bien. Le Boucau-Stade devient propriétaire du terrain le  25/11/1921, il l’agrandira avec un autre acte du 3/11/1927. 

Le stade de Piquessary dans les années 1930-1940

Le 9/1/1967 il lègue le terrain et ses installations à la ville du Boucau qui en assure désormais l’entretien.



[1] Fondé en 1907 le Boucau-Stade change de nom le 25/3/1988 pour s’appeler Boucau-Tarnos-Stade

[2] Marie Anne de Neubourg (1667-1740) fut reine d’Espagne par son mariage avec Charles II, le couple n’eut pas d’enfants. Le roi meurt le 1/12/1700 et avec ce décès s’ouvre la guerre de succession d’Espagne. Elle est exilée en France, à Bayonne, en 1708, par Louis XIV qui avait placé sur le trône d’Espagne son petit-fils le futur Philippe V. A Bayonne elle a vécu rue Montaut. Son exil prit fin en septembre 1738. Elle est décédée à Guadalajara le 16/7/1740.

[3]  Ancêtre de Ferdinand de Lesseps le constructeur du canal de Suez

[4]  A chaque enchère une bougie est allumée. Si elle s’éteint sans nouvelle enchère, une seconde bougie est allumée, puis une troisième. A son extinction le dernier enchérisseur emporte l’objet. (Les bougies durent 30 secondes environ)

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